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Dans le Jura, l’exploration du gaz de schiste avance masquée
mardi 18 juin 2013
Dans le Jura, l’exploration du gaz de schiste avance masquée
Lire l’article sur Rue 89 Lyon.fr
Extraits :
Malgré l’interdiction d’explorer le gaz de schiste établie depuis juillet 2011, les sociétés pétrolières et gazières ne restent pas inactives. Dans les montagnes du Jura, à une centaine de kilomètres de Lyon, les élus et les habitants sont directement approchés pour trouver des terrains à forer, sous couvert d’exploration d’ « hydrocarbures conventionnels ».
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En France, les pétroliers et les gaziers fourbissent leurs armes pour ne pas passer à côté de cette manne énergétique.
Il y a ceux qui font du lobbying et bénéficient de relais chez les parlementaires, comme on a pu le constater récemment avec le rapport d’étape de l’Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques.
Il y a ceux qui lancent des recours juridiques pour contester l’interdiction de la fracturation hydraulique.
Et puis, il y a ceux, beaucoup plus rares qui essayent de convaincre élus et habitants de leur louer des terrains pour procéder à un forage exploratoire.
C’est le cas de la société britannique Celtique Energie qui possède trois permis d’exploration pour tout le massif du Jura (deux en France et un en Suisse). Officiellement, elle n’a le droit de chercher que du gaz et du pétrole conventionnels (les hydrocarbures qui se pompent sans fracturation hydraulique). Officieusement, le gaz de schiste les fait davantage saliver.
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Les VRP du gaz et du pétrole
Malgré tout, le représentant de Celtique Energie continue d’appeler (les mairies). Dernièrement, ce VRP du pétrole a évoqué une assurance contre une éventuelle pollution suite à un éventuel forage.
Les maires en première ligne
Les maires de ces communes, en première ligne face à l’entreprise d’exploration pétrolière, ne compte plus sur « l’Etat » pour les défendre.
Derrière le pétrole conventionnel, le pétrole de schiste
Ces petits élus de montagne restent imperméables aux propositions de Celtique Energie, malgré un changement de communication. Désormais, il n’est plus question d’explorer du gaz ou pétrole de schiste.
Suite à la loi du 13 juillet 2011, Celtique Energie a dû s’engager à ne chercher que des hydrocarbures « conventionnels » et non des gaz de schiste qui se libèrent sous le coup de la fracturation hydraulique.
Contrairement à d’autres permis qui ont été annulés, l’Etat a validé cette orientation mais doit se prononcer d’ici début 2014 sur une demande de renouvellement déposée fin 2012 (les permis durent six ans). Et la DREAL (Direction régionale de l’environnement, de l’aménagement et du logement) n’a pas encore donné un avis positif.
Double discours
l y a notamment un document particulièrement gênant pour la stratégie de Celtique Energie. Dans un rapport confidentiel rendu public par le quotidien suisse « Le Courrier » du 12 juin, Celtique estime que dans le Jura le potentiel du gaz de schiste (shale gas, en anglais) est supérieur au potentiel du gaz conventionnel
Plus précisément, il est écrit dans ce rapport qu’au sud du permis des Moussières, c’est à dire sous les communes montagneuses de Corcelles et Lantenay, se trouve surtout du pétrole de schiste.
Ce document non-daté mais qui remonte certainement à début 2010 est destiné aux investisseurs.
Pourtant, joint par Rue89Lyon, le responsable de la communication Celtique Energie en France, Saïd Aissaouri, ne « croit pas » qu’il y ait du pétrole de schiste. Il précise :
« Il n’a jamais été question d’explorer du gaz ou du pétrole de schiste, il n’en est pas question et il n’en sera pas question ».
Ce représentant de Celtique Energie semble avoir la mémoire courte.
Même sans gaz de schiste, la méthode de forage pose problème
Christine Monnet ... milite contre le retour des forages dans sa commune de Corcelles. En 1989, elle a assisté ... à un forage exploratoire mené par Esso. A l’époque on ne parlait pas encore de gaz de schiste.
Pendant plusieurs semaines, elle a vu passer les « camions de Schlumberger » remplis d’acide qui étaient ensuite « versés dans la cheminée » :
« On a eu droit également à des infiltrations d’azote et aux camions vibreurs. On nous a cassé notre vie. En partant, ils ont dit qu’ils reviendraient lorsque l’on connaîtrait une nouvelle technologie ».
L’exploration de 1989 a donné quelques dizaines de barils de pétrole conventionnel. Insuffisant pour Esso.
« Celtique Energie réussirait là où Esso a échoué. Ça ne tient pas », disent les opposants regroupés au sein du « Collectif du Haut-Bugey contre le gaz de schiste ».
« Forage à l’eau claire »
Dans un courrier au maire de Corcelles, le directeur de Celtique Energie affirme qu’ils vont utiliser une « technique nouvelle, celle du forage horizontale » pour atteindre ce pétrole conventionnel dans la couche de grès. Au maire de Nantua, ils ont parlé de forer « à l’eau claire ». Plus précisément, l’idée est de forer un « puits d’injection d’eau (…) pour repousser le pétrole en direction du puits producteur ».
L’ingénieur hydrologue à la retraite, Jacques Cambon, vice-président du collectif contre les forages, ne croit pas en la « stimulation douce » de la roche, pas plus qu’il ne croit Celtique Energie quand elle affirme qu’elle n’utilisera que des « techniques conventionnelles » (des hydrocarbures qui se pompent sans fracturation hydraulique)
Un précédent gênant : un forage a pollué une source
En 1989, Esso a procédé à des forages dans quatre zones, toutes situées dans le Haut-Bugey. L’un de ses forages d’hydrocarbure a eu lieu sur la commune de Lantenay. Mais ce sont deux autres petits villages en contre-bas qui ont vu leur source polluée, la Moullaz.
L’expertise du BRGM (Bureau de Recherches Géologiques et Minières), établissement public, a conclu que cette pollution était due aux produits utilisés pendant le forage
Des actionnaires dans les paradis fiscaux
Pour le moment les principaux élus concernés tiennent le même discours : la défense de la qualité de vie qui passe par la défense de l’environnement.
« Il faut être cohérent. On a investi plus d’un million d’euros dans l’office du tourisme pour améliorer notre image et attirer les touristes et ceux qui recherchent une meilleure qualité de vie. Celtique nous parle de 13 emplois temporaires et quelques milliers d’euros si les objectifs de production sont atteints. C’est ridicule ».
Les élus défendent un tourisme rural et, surtout, l’Appellation d’Origine Contrôlée (AOC) Comté, qui permet de maintenir une agriculture de montagne
Des images à la télé : « ça explosait au robinet et les gens étaient malades »
Ici, la grande majorité des habitants serait contre
Il faut préciser que Celtique Energie ne veut pas acheter, le propriétaire partageant la responsabilité d’une éventuelle pollution.
Celtique Energie voulait louer une bande de terre de 1500 m2. Le prix ? Celtique a seulement fait une proposition à 837 euros par hectare et par an.