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Réchauffement : le GIEC met en garde contre des effets sévères et irréversibles
dimanche 2 novembre 2014
RÉCHAUFFEMENT : LE GIEC MET EN GARDE CONTRE DES EFFETS SÉVÈRES ET IRRÉVERSIBLES
Article de Stéphane Foucart sur Le Monde.fr
Agir vite et fort, sans quoi le changement climatique produira de plus en plus d’« effets pervasifs, sévères et irréversibles » sur les sociétés humaines et les écosystèmes. C’est avec des mots inhabituellement forts que le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) a rendu public, dimanche 2 novembre à Copenhague (Danemark), la synthèse de son cinquième rapport, en présence de Ban Ki-moon.
« Le rapport que nous présentons a été conduit par plusieurs centaines de scientifiques internationaux et est le plus complet jamais entrepris sur le sujet, a déclaré le secrétaire général des Nations unies. Il offre trois messages-clés.
D’abord, l’influence des hommes sur le climat est claire, et cette influence croît rapidement.
Ensuite, nous devons agir vite et de manière décisive si nous voulons éviter des conséquences destructrices.
Enfin, nous avons les moyens de limiter le changement climatique en cours et construire un meilleur futur. »
Désormais, a-t-il ajouté, « les décideurs doivent prendre les décisions, car le temps joue contre nous ».
Le rapport présenté rassemble et résume les trois volets publiés par le GIEC depuis septembre 2013 :
le premier sur l’état de la science climatique,
le second sur les impacts et les vulnérabilités des différentes régions du monde,
et le troisième sur les leviers d’action économique pour limiter le réchauffement.
Il servira de base scientifique et économique aux négociations qui se tiendront en décembre à Lima (Pérou), puis à Paris en 2015, où elles pourraient se conclure par un accord contraignant de réduction des émissions au niveau mondial.
Teneur en dioxyde de carbone inédite
« Avec ce rapport, le message est plus précis, plus fort et le niveau de confiance est significativement plus important que ce qui était disponible en 2009. L’ignorance ne peut plus être un prétexte à l’inaction, a déclaré Michel Jarraud, secrétaire général de l’Organisation météorologique mondiale (OMM), sous l’égide de laquelle est placé le GIEC. Dans trente ans, les gouvernements et les décideurs, à tous les niveaux, pourront être tenus pour responsables des décisions qui ne seraient pas prises maintenant, car la connaissance est là. Nous savons. Nous n’avons plus d’excuses pour ne pas agir. »
Selon le rapport, la teneur atmosphérique en dioxyde de carbone (CO2), le principal gaz à effet de serre émis par les activités humaines, est inédite depuis huit cent mille ans au moins. La température de la basse atmosphère terrestre a grimpé de 0,85 °C depuis la fin du XIXe siècle. Le niveau des océans s’est élevé de 19 centimètres, « ce qui est déjà un signal d’alarme dans de nombreuses régions du monde », a dit Rajendra Pachauri, le président du GIEC. La quantité globale de neiges et de glaces à la surface de la Terre a chuté dans la plupart des régions du monde. « Les effets du changement climatique se sont déjà fait sentir au cours des récentes décennies sur tous les continents et les océans », écrivent les scientifiques.
Pour conserver une bonne probabilité de demeurer sous les 2 °C de réchauffement par rapport à la période préindustrielle – le seuil de danger adopté par la communauté internationale en 2009 –, les émissions mondiales de gaz à effet de serre doivent être réduites de 40 % à 70 % d’ici à 2050, par rapport à leur niveau de 2010. Or, avertit M. Pachauri, « depuis 2010, les émissions augmentent plus vite encore que dans les décennies précédentes ».
« Grands risques pour la sécurité alimentaire mondiale »
Pour maintenir la stabilité climatique de la planète, les scientifiques réunis par le GIEC ajoutent que « les niveaux d’émissions devront être proches de zéro en 2100, voire en dessous » – c’est-à-dire que, globalement, le système économique devra fonctionner en absorbant du CO2 plutôt qu’en en émettant comme c’est le cas aujourd’hui. « Une augmentation de la température moyenne au-delà de 4 °C, combinée à une augmentation de la demande en alimentation, représenterait de grands risques pour la sécurité alimentaire mondiale », estiment les scientifiques.
« Il y a un mythe selon lequel l’action climatique coûtera très cher, alors que l’inaction coûtera beaucoup, beaucoup plus cher », a expliqué M. Pachauri. De fait, selon les simulations conduites par les économistes réunis par le GIEC, une politique climatique ambitieuse, conduite au niveau mondiale et permettant de demeurer sous la barre des 2 °C de réchauffement, ne se solderait que par une faible réduction de la croissance. « Cela correspond à une réduction annuelle de 0,04 % à 0,14 %, avec comme valeur médiane 0,06 %, par rapport à une croissance de la consommation comprise entre 1,6 % et 3 % par an », écrivent les experts.
Cependant, ces estimations sont calculées sans tenir compte des dégâts que la part désormais inévitable du réchauffement produira sur les économies. « Et plus nous attendons, plus ces coûts seront importants », dit le président du GIEC. Même en cas de politique climatique très ambitieuse, l’avenir sera donc peut-être un peu moins rose que ne le disent les 0,06 % de réduction de consommation sortis des modèles économiques du GIEC. En outre, a ajouté M. Pachauri, les efforts à accomplir ne se feront pas « sans changement des styles de vie et des comportements ». Dans une déclaration qui ne plaira pas aux industries extractrices, le président du GIEC a également ajouté que « traiter la question du changement climatique ne sera pas possible si des agents économiques mettent chacun en avant leurs intérêts de manière indépendante : cela peut être uniquement fait par le biais de la coopération. »
Article de Stéphane Foucart sur Le Monde.fr
Note à propos de la COP 21 (Conférence Paris Climat) du 30/11 au 11/12 2015 (pdf 73 ko)