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Brève histoire des permis d’hydrocarbures en France. Chant du coq ou chant du cygne ?
lundi 9 février 2015
BRÈVE HISTOIRE DES PERMIS D’HYDROCARBURES EN FRANCE
CHANT DU COQ OU CHANT DU CYGNE ?
Après l’indépendance de l’Algérie, et malgré son immense domaine maritime, la France ne disposait plus de grandes réserves de pétrole ou de gaz techniquement et économiquement accessibles. Les chocs pétroliers de 1973 et 1979 ont stimulé la recherche et la production, mais la chute des prix mondiaux dans les années 90 et l’épuisement des gisements conventionnels ont interrompu ce processus. La mise au point de nouvelles techniques aux Etats-Unis, combinant puits horizontaux et fracturation hydrauliqiue, et la nouvelle envolée des cours dans les années 2000 ont conduit à reprendre les recherches. Elles visent cette fois, même si ce n’est pas toujours dit clairement, des ressources non conventionnelles : gaz ou pétrole de schiste, gaz de houille, peut-être tight gas, et maritime profond ou ultraprofond.
L’évolution historique des demandes et des octrois de permis de recherche illustre l’enchaînement de ces deux périodes. En dehors même des aspects climatiques, sociaux, juridiques, sanitaires ou environnementaux, l’année 2015 se présente comme une année à risques pour les pétroliers, aux Etats-Unis et ailleurs, avec une baisse des investissements et de la rentabilité dans les hydrocarbures non conventionnels, et de grandes incertitudes pour ce secteur dans les prochaines années.
I- La période de l’exploitation "conventionnelle"
La France, on le sait, n’a jamais été un gros producteur de gaz, encore moins de pétrole. Le Bassin parisien, l’Aquitaine, le Nord et le Nord-Est ont été prospectés, depuis longtemps, parfois avec succès. En témoignent par exemple le pétrole de Péchelbronn depuis 1921, le gaz de Lacq et le pétrole de Parentis depuis les années 50, le gaz de mine de Poissonière depuis 1992, et d’autres sites moins connus.
II - L’émergence du non-conventionnel
En 2008-2009, les choses commencent pourtant à changer, lentement d’abord, puis de manière brutale en 2010. Les demandes de permis explosent ( 18 en 2008, 26 en 2009, 58 en 2010).
Comment se fait-il que notre sous-sol, exploré et exploité depuis si longtemps, en voie de délaissement faute de réserves conventionnelles suffisantes, devienne soudain l’objet de toutes les convoitises, un "eldorado" recélant un "trésor sous nos pieds", un Dallas en Europe, attirant des entreprises3 du monde entier, des plus grandes (Total) aux plus petites entités familiales (moins de 5000 euros de capital ) ?
Aujourd’hui...
Le mouvement reprend, timide mais évident, sous la présidence de F. Hollande. Les lobbies pétroliers semblent avoir trouvé de nouveaux relais institutionnels (OPCEST, Ministères de l’économie, du redressement productif, cabinets ministériels...). Les remplacements de N.Bricq, puis de D.Batho au ministère de l’écologie en sont les symptomes les plus apparents. Plus récemment, S.Royal étant désormais en charge de ce ministère, les demandes réapparaissent, et plusieurs dossiers sortent de la pile en stock, pour être remis dans le circuit des procédures d’instruction.
A ce jour, les creux de 2011-2012 ont été comblés, et le mouvement de reprises semble se confirmer.
Demain...
Les mois qui viennent rendront inévitables certaines clarifications sur des sujets tels que le code minier, la place des hydrocarbures dans la transition énergétique, les émissions de gaz à effets de serre.
Mais une chose est sûre : sur le territoire français, la période des hydrocarbures conventionnels est pratiquement terminée. Sauf rares exceptions, les objectifs visés sont à l’évidence des gisements d’hydrocarbures non-conventionnels. Les rapports remis par les demandeurs depuis 2011, et leurs déclarations répétées clament qu’ils ne visent que du conventionnel, mais il est clair que cela n’est pas crédible. C’est ce qu’affirmaient le rapport de l’EIA et celui du CGIET/CGEDD déjà cités. C’est ce que confirment les situations de concurrence entre demandes nouvelles et demandes connues pour viser le non-conventionnel.
Et comme s’il fallait une confirmation supplémentaire, au moment où nous terminons la rédaction de ce texte, nous apprenons13 qu’un lobby constitué de plusieurs grandes entreprises, du secteur pétrolier mais pas seulement, vient de se constituer, sous la houlette de J.L.Schilansky14, avec l’intention de convaincre la population et surtout les décideurs, que l’activité de recherche et de production d’hydrocarbures doit nettement reprendre en France.
Son nom ? Le Centre Hydrocarbures Non Conventionnels (CHNC).
Tout un progamme...
Nicolas Daures. 31 janvier 2015